Édition du vendredi 24 mai 2019
Loi Élan et instruction des autorisations d'urbanisme : les prestataires privés entrent (officiellement) dans la danse
C’est peut-être l’une des dispositions les plus « disruptives » de la loi Élan en matière d’urbanisme : les communes et les EPCI peuvent désormais confier l'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme à des prestataires privés (art. 62-III de la loi Élan). Au Journal officiel de ce jour figure le décret (n° 2019-505 du 23 mai) devant préciser les modalités d’application de cette nouvelle possibilité. Mais sa rédaction elliptique pose de nouvelles questions.
En effet, le Conseil d’État s’est montré particulièrement prudent à l’égard du texte proposé par le gouvernement : le décret final se contente de compléter l’article R. 423-15 du Code de l’urbanisme – qui fixe la liste des services et organismes pouvant se voir confier l’instruction des demandes de permis et des déclarations préalables – pour y ajouter un alinéa mentionnant « un prestataire privé, dans les conditions prévues au septième alinéa de l'article L. 423-1 ».
Pas de délégation de signature
Ajouté par l’article 62-III de la loi Elan, ce dernier alinéa de l’article L. 423-1 du Code de l’urbanisme prévoit certains garde-fous. En particulier, si l’instruction des demandes peut être confiée à un ou plusieurs prestataires privés, l’autorité de délivrance « conserve la compétence de signature des actes d'instruction » : aucune délégation ne peut être consentie en la matière.
En outre, les prestataires agissant sous la responsabilité de la commune ou de l’EPCI « ne peuvent pas se voir confier des missions qui les exposeraient à un intérêt privé de nature à influencer, ou paraître influencer, l'exercice indépendant, impartial et objectif de leurs fonctions ». Et l’autorité de délivrance « garde l'entière liberté de ne pas suivre la proposition du ou des prestataires ». Enfin, « aucune charge financière pour les pétitionnaires » ne doit résulter de ce choix de l’organe délibérant de la commune ou de l’EPCI.
Si l’on pouvait légitimement attendre du décret du 23 mai des précisions sur la mise en œuvre du dispositif – pour en assurer la sécurité juridique, notamment –, la version finale du texte est pour le moins minimaliste. Le Conseil d’État est passé par là : les précisions du projet de texte ont été juridiquement balayées, notamment celles rendant le dispositif applicable à l’instruction des demandes de certificat d’urbanisme – qui ne sont pas des autorisations au sens strict.
Un guide pratique à la rescousse
Autre revers : le décret initial précisait les conditions dans lesquelles pouvaient être vérifiées l’indépendance et l’objectivité du prestataire, lors de la passation et de l’exécution du marché public lui confiant l’instruction des autorisations. Le Conseil d’État a estimé que ces précisions n’ajoutaient rien aux règles de la commande publique, et qu’un simple guide suffirait à éclairer les collectivités souhaitant recourir à cette possibilité.
En clair, l’avenir du dispositif se jouera hors cadre réglementaire dès lors que le modèle économique le sera viable, ce qui n'est acté aujourd'hui. La jurisprudence a d’ailleurs pris les devants : par un arrêt du 28 février, la cour administrative d’appel de Lyon a estimé que les dispositions antérieures à la loi Élan n’interdisaient pas « de confier, à titre onéreux et après mise en concurrence, l’étude technique de ces dossiers, exclusive de tout acte d’instruction, à des prestataires extérieurs qu’ils soient d’ailleurs publics ou privés ». Un travail commun entre ministères et acteurs concernés – AMF en tête – va désormais s’engager pour doter les communes et EPCI pionniers d’outils pratiques, (recommandations, guides, clauses-types, etc.).
Télécharger le décret.
En effet, le Conseil d’État s’est montré particulièrement prudent à l’égard du texte proposé par le gouvernement : le décret final se contente de compléter l’article R. 423-15 du Code de l’urbanisme – qui fixe la liste des services et organismes pouvant se voir confier l’instruction des demandes de permis et des déclarations préalables – pour y ajouter un alinéa mentionnant « un prestataire privé, dans les conditions prévues au septième alinéa de l'article L. 423-1 ».
Pas de délégation de signature
Ajouté par l’article 62-III de la loi Elan, ce dernier alinéa de l’article L. 423-1 du Code de l’urbanisme prévoit certains garde-fous. En particulier, si l’instruction des demandes peut être confiée à un ou plusieurs prestataires privés, l’autorité de délivrance « conserve la compétence de signature des actes d'instruction » : aucune délégation ne peut être consentie en la matière.
En outre, les prestataires agissant sous la responsabilité de la commune ou de l’EPCI « ne peuvent pas se voir confier des missions qui les exposeraient à un intérêt privé de nature à influencer, ou paraître influencer, l'exercice indépendant, impartial et objectif de leurs fonctions ». Et l’autorité de délivrance « garde l'entière liberté de ne pas suivre la proposition du ou des prestataires ». Enfin, « aucune charge financière pour les pétitionnaires » ne doit résulter de ce choix de l’organe délibérant de la commune ou de l’EPCI.
Si l’on pouvait légitimement attendre du décret du 23 mai des précisions sur la mise en œuvre du dispositif – pour en assurer la sécurité juridique, notamment –, la version finale du texte est pour le moins minimaliste. Le Conseil d’État est passé par là : les précisions du projet de texte ont été juridiquement balayées, notamment celles rendant le dispositif applicable à l’instruction des demandes de certificat d’urbanisme – qui ne sont pas des autorisations au sens strict.
Un guide pratique à la rescousse
Autre revers : le décret initial précisait les conditions dans lesquelles pouvaient être vérifiées l’indépendance et l’objectivité du prestataire, lors de la passation et de l’exécution du marché public lui confiant l’instruction des autorisations. Le Conseil d’État a estimé que ces précisions n’ajoutaient rien aux règles de la commande publique, et qu’un simple guide suffirait à éclairer les collectivités souhaitant recourir à cette possibilité.
En clair, l’avenir du dispositif se jouera hors cadre réglementaire dès lors que le modèle économique le sera viable, ce qui n'est acté aujourd'hui. La jurisprudence a d’ailleurs pris les devants : par un arrêt du 28 février, la cour administrative d’appel de Lyon a estimé que les dispositions antérieures à la loi Élan n’interdisaient pas « de confier, à titre onéreux et après mise en concurrence, l’étude technique de ces dossiers, exclusive de tout acte d’instruction, à des prestataires extérieurs qu’ils soient d’ailleurs publics ou privés ». Un travail commun entre ministères et acteurs concernés – AMF en tête – va désormais s’engager pour doter les communes et EPCI pionniers d’outils pratiques, (recommandations, guides, clauses-types, etc.).
Caroline St-André
Télécharger le décret.
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